Mes roses : une exploration picturale entre couleur, narration et temporalité
Bien avant que ma pratique artistique ne s'oriente vers le fusain, la sculpture ou les techniques hybrides inspirées de l’estampe et de la sérigraphie, j’avais entamé un dialogue singulier avec la peinture. Une série que j’ai nommée Mes roses a marqué une étape essentielle dans ma démarche. Était-ce un fondement intuitif de mes recherches ultérieures ? Ou simplement une expérimentation isolée, un écho qui résonne encore aujourd’hui ?
L’imagerie cinématographique comme point de départ
Dans cette série, j’ai cherché à explorer la manière dont la couleur, en tant que langage pictural, peut transcender les références narratives et iconographiques. Inspirées d’images cinématographiques, mes peintures se détachent volontairement de leur contexte d’origine. Ce "détournement narratif" vise à déconstruire les codes visuels qui les définissent, transformant une scène familière en une composition ouverte, plus abstraite et introspective.
La couleur comme langage du temps et de l’émotion
Au cœur de cette série, la couleur est pensée non seulement comme un vecteur de sensibilité, mais aussi comme un moyen de structurer la temporalité et l’émotion. Les peintures étaient organisées autour de trois palettes symboliques :
- Les teintes de rose représentaient l’action émotionnelle, capturant l’intensité subjective d’un instant ou d’une relation.
- Le noir et blanc symbolisait les événements passés, ancrant l’image dans une mémoire lointaine ou révolue.
- Les couleurs originelles incarnaient l’instant présent, l’événement se déroulant sous nos yeux dans toute sa vitalité.
Ce langage chromatique faisait écho à mon intérêt pour la manière dont une image peut évoquer des états d’être ou des couches de sens au-delà de son apparence immédiate.
Une rupture dans la lecture iconographique
Chaque toile a été conçue pour brouiller la frontière entre ce qui est montré et ce qui est perçu. En jouant sur les ruptures dans la composition et en altérant subtilement les indices narratifs, j’ai cherché à créer des espaces de réflexion où l’iconographie s’efface au profit de l’expérience visuelle pure. Ce travail semble déjà contenir les germes d’un questionnement que j’explore encore aujourd’hui : comment une image peut-elle devenir l’épitomé de ce qu’elle représente, une essence intemporelle et universelle ?
Une étape dans une réflexion plus large ?
Avec le recul, je perçois dans Mes roses un désir latent d’interroger la transformation d’une idée à travers sa matérialisation visuelle. Cette interrogation, mêlant temporalité, émotion et forme, se retrouve dans mes séries de dessins au fusain où le geste d’effacement devient un moyen de révéler l’essentiel, ou dans mes sculptures où l’éphémère est figé dans la pierre. Bien que la peinture ait depuis laissé place à d’autres médiums, cette série marque pour moi une étape où j’ai commencé à explorer comment une œuvre peut résonner entre ce qu’elle montre et ce qu’elle évoque.
Une œuvre en écho
Mes roses s’impose donc comme une œuvre charnière, un moment où ma pratique artistique expérimentait déjà des idées de déconstruction et de transformation. En structurant mon travail autour de la couleur, de la temporalité et de l’émotion, cette série demeure un rappel que chaque étape de création, même apparemment isolée, nourrit une réflexion plus large en constante évolution.